lundi 18 avril 2016

Le dilemme des naufragés

Extension de l'article précédent, je rappelle le dilemme des naufragés.
Vous vous retrouvez sur une embarcation de fortune, vous êtes trop nombreux sur le radeau, il risque de couler à tout moment. En sacrifiant un ou deux passagers, vous augmentez considérablement les chances de survie de ceux qui restent...
Vous avez donc le choix : que faire?

C'est là qu'on voit la hiérarchisation des valeurs, des priorités.

La décision sera simple pour celui qui voudra à tout prix survivre : il cherchera à rester coûte que coûte sur le radeau, il encouragera plus ou moins discrètement toutes les tentations de sacrifices, du moment qu'il ne se sentira pas concerné, à aucun risque.

Certains se réfugieront derrière la démocratie : la force du nombre plutôt que la force d'un seul. Le monde aura vite fait de trouver un bouc émissaire, il suffira de faire converger les avis vers une seule personne pour trouver un volontaire à sacrifier... Difficile de trouver une situation qui illustre mieux les problèmes de la démocratie.

D'autres se réfugieront derrière d'autres calculs : ils chercheront des critères objectifs pour trouver quels passagers il faut sacrifier : le plus vieux, le plus pauvre, le plus gros, le meilleur nageur...

Certains se porteront volontaires, car ils n'auront pas grand chose à perdre, ou qu'ils préfèrent sauver la vie de leur enfant ou de leur conjoint plutôt que de courir le risque de les voir sacrifier (mais bon, autant attendre de voir si la personne aimée est nommée ou pas...)

Certains trouveront tout choix contraire à leur moral, et préféreront rester solidaires face au risque plutôt que de pousser voire même d'accepter le sacrifice de quelqu'un.

Certains s'en remettraient à une figure d'autorité pour décider à leur place : le plus sage, le plus fort, le plus vieux, le plus gradé du radeau... Exit la difficulté et la responsabilité.

On pourrait aussi imaginer une solution plus libre, ou chacun respecterait le choix des autres : ceux qui ne veulent aucun sacrifice avec ceux qui ne veulent pas se sacrifier, les démocrates qui votent entre eux pour élire le sacrifier parmi eux (sans imposer leur choix à quelqu'un qui n'aurait pas accepter ce système) ou parmi les volontaires réels. Avec un tel système nous verrions les véritables démocrates.

On pourrait aussi imaginer plus gore : chacun se déleste d'un membre, mais bon, à part un psychopathe, qui penserait à cette solution?

Bref, je ne sais pas s'il y a une bonne réponse à ce dilemme, mais il nous renseigne sur notre capacité à transiger avec nos valeurs morales et notre capacité (ou en tout cas notre confiance en cette capacité) à vivre avec la culpabilité associée à nos choix, à nous auto-persuader que nous étions dans notre bon droit (à coup d'argument démocratique ou d'arguments objectifs et raisonnables...)

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