dimanche 14 décembre 2014

On pardonne plus facilement les actes que les paroles

Étrange paradoxe, vu qu'on ne fait qu'entendre que les paroles s'envolent, que seuls les actes comptent.
Mais ce qui est vrai pour les actes positifs ne l'est pas pour le négatif. Le ressenti est totalement contraire.

Pour un acte positif, une parole ne sera qu'une déclaration de bonne intention. On mettra sans arrêt en doute la parole de l'autre, jusqu'à la réalisation de la promesse. Les paroles seront jugées sans consistance, seuls les actes seront considérés comme des preuves : on a besoin de concret pour être rassuré. On est (généralement) à la fois trop suspicieux et trop peu confiant pour se contenter de belles paroles. Seuls les enfants, les naïfs et les innocents se contenteront de ces paroles et seront immédiatement rassurés par elles, sans demander ou exiger la suite, leur application. Les autres se mettront tout de suite en position d'attente, impatients.

Face au négatif, notre réaction est presque contraire.
L'acte est brutal, donné sans explication. Et ce doute laissera suffisamment de place à notre imagination pour permettre des interprétations : on pourra trouver des excuses aux actes, des explications, des circonstances atténuantes. Sans aller nécessairement jusqu'au syndrome de Stockholm, on pardonnera facilement un acte : soit en se concentrant sur son caractère accidentel, soit en interprétant les motivations de l'auteur.
Mais la parole est censée être en lien direct avec la pensée, elle laisse ainsi moins de place à l'interprétation. On acceptera beaucoup plus facilement l'explication d'un moment de folie pour expliquer un geste en trop, dénué de raison. On ne l'acceptera pas aussi facilement (sans doute à tort) pour une parole : la parole nécessite l'usage de la raison.
Étrange conclusion, mais l'homme peut perdre la maîtrise de ses actes, mais pas celle de ses mots. Et lorsqu'il y a maîtrise, on arrive à trouver des explications à des faits, car on en cherche le sens. Celui des mots est tout trouvé, il n'y a rien à chercher.

Pourquoi les mots restent ils autant en mémoire? L'explication est simple : ce qui nous marque et nous blesse, c'est une émotion. Se souvenir d'un geste traumatisant ne fait pas revivre la situation, le souvenir mettra une certaine distance entre nous et le traumatisme. Alors que se souvenir des mots, c'est revivre quasi exactement le traumatisme, c'est entendre à nouveau ces mêmes paroles. Le souvenir d'un coup de poignard n'a jamais rouvert une plaie, au contraire du souvenir d'une insulte.

Les deux phénomènes peuvent trouver une explication dans la confiance en soi, ou plutôt dans ce manque de confiance. Il nous rend méfiant vis à vis des autres (comment pourraient il tenir parole si nous doutons de la nôtre? comment pourraient ils être bons si nous ne pensons pas l'être?) et extrêmement fragile vis à vis de leurs critiques, violences, moqueries, insultes...

La conclusion peut être multiple :
- si vous voulez blesser quelqu'un, visez la psychologie plutôt que le physique
- la violence physique est moins importante que la violence morale sur le long terme
Mais surtout, les  deux conclusions positives :
- ne répondez jamais à une violence physique par des mots, même si c'est fait dans le but d'apaiser une situation tendue. Les paroles resteront, pas les actes, eux seront oubliés rapidement.
- et surtout, veillez à ne pas laisser échapper des mots qui dépassent votre pensée. Ceux-ci marquent une vie... malheureusement.

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