dimanche 12 avril 2015

L'héritage (suite) et les personnes morales

Suite de la réflexion sur l'héritage, après le cas individuel, le cas des entreprises : et c'est là que nous nous apercevons que nous avons créé de nouveaux monstres.

A l'origine, l'entreprise était l'oeuvre d'un unique homme, d'un artisan. L'entreprise et l'homme ne faisaient qu'un, facile à suivre.
Puis l'entreprise est devenue rapidement familiale. Mais au début, l'entreprise se confondait avec la famille : si la famille s'arrête, l'entreprise aussi. La seule richesse de l'entreprise était ses composantes. La transmission était simple et sans doute assimilée à l'héritage individuel. Jusqu'ici, tout va bien.


Mais avec le temps, l'entreprise a réussi a concentrer davantage de richesse, de capital, elle a commencé à avoir sa vie propre, à se détacher de la famille, de ses origines. On en est même venu à créer des personnes morales pour les représenter. Cet artifice a sans doute apporter beaucoup aux entreprises et a permis leur essor, l'essor de l'économie et la protection des personnes, mais pas sûr que la réflexion ait été complète.

La personne morale de l'entreprise est immortelle, elle s'affranchit donc de toute notion d'héritage. Peut être que cette notion a été intégrée aux impôts sur les société, mais j'en doute (et malheureusement je ne suis pas assez calé pour le vérifier...). Du coup, le capital peut tranquillement s'accumuler, sans crainte de devoir être redistribué à la communauté un jour.

L'artifice était peut être nécessaire pour permettre un réel progrès, mais en faisant ça on a peut être déséquilibré la donne : d'un côté des hommes mortels, de l'autre les sociétés immortelles. En faisant ça on leur a accordé un statut proche de l'état : l'état était sans doute la première personne morale de l'histoire. Rien d'étonnant donc à voir maintenant les entreprises concurrencer les états. Au final, elles suivent la même voie, la même histoire, la même dynamique, à ceci près que les sociétés s'affranchissent des frontières physiques. Les états se sont concentrés petit à petit, au travers de guerres de conquêtes, de lutte d'influence, de colonisation. Les entreprises procèdent de la même manière, sauf que leur territoire est virtuel et ne se dessine que dans les banques : les obligations sont moindres, et surtout tout peut se faire dans l'ombre. Un état qui voulait gouverner le monde était visible aux yeux de tous, pour les sociétés, c'est plus opaque : il faut être initié pour voir et comprendre toutes les manœuvres.

Et ce phénomène n'a aucune raison de s'arrêter : nous allons sans doute vers de plus en plus de concentration, vers des entreprises de plus en plus puissantes face à des états au mieux stagnants. Les nations ont remis les clés du pouvoir aux entreprises, voyant le progrès ici, comme un fruit de la croissance économique (après tout il y a une certaine logique : plus nous créerons de richesse collectivement, plus notre niveau de vie collectif sera amélioré... restait le problème de la redistribution, mais celui-ci a été mis de côté j'ai l'impression). La question est peut être maintenant de savoir si les entreprises rendront la pareille aux états, voyant leurs propres limites et leur salut au travers du politique? Car on peut imaginer sans problème un monde ou les entreprises deviennent reine, mais elles ne pourront pas s'affranchir du monde physique, des infrastructures... : tout n'est pas encore virtuel !

Ça devrait m'inspirer un prochain article ça...

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