dimanche 23 novembre 2014

L'ordre, et l'ordre seul, fait en définitive la liberté. Le désordre fait la servitude.

Citation de Charles Péguy.

Comme toujours, commençons par les définitions : la Liberté.
C'est la capacité à agir selon sa volonté : sans entrave et sans contrainte.
Mais avant même l'action vient la pensée, qui forme la volonté : c'est donc de manière primaire la capacité à penser sans entrave, sans devoir suivre un chemin pré-établi, que ce soit par les autres ou par soi-même.

En ce sens, il n'y a pas de liberté absolue : de toute façons, les notions pures et abstraites ne se retrouvent jamais dans le monde matériel, dans la réalité. Notre existence même nous limite, notre nature (humaine en l'occurrence) est notre première contrainte.
Notre physiologie nous limite : il nous sera dur de voler ou nager réellement comme un poisson, tout comme notre cerveau nous interdit peut être d'élaborer certains concepts.
Notre époque, notre culture et notre éducation viennent ensuite poser les barrières suivantes : difficile de s'en extraire. Nous pensons en Français, avec nos mots, nos tournures et l'ensemble de nos connaissances acquises, à notre époque.
Mais ces barrières nous permettent en même temps de nous émanciper du niveau précédent en quelque sorte. L'ordre apporté par la civilisation et la culture nous permet de nous affranchir de contraintes ancestrales : nous nous éloignons de notre statut d'animal.

Et la citation s'explique toute seule... L'ordre apporté à un certain niveau permet de gagner de la liberté sur un niveau inférieur. Et on retombe sur la notion de transcendance : du moment qu'on met une hiérarchie à un endroit, la transcendance apparaît, c'est simplement au final l'existence de conséquences à un autre niveau que les causes. Les actions humaines sur la vie en société (civilisation, culture...), les règles établies définissent un certain ordre, et permettent de s'affranchir de l'ordre animal.

La citation pourrait se résumer avec la question suivante : l'homme actuel est il plus libre que l'animal?
La première intuition peut être contraire : l'homme est moins libre, il doit obéir à des tas de règlements et d'usages. Mais ça lui a permis de dompter la nature : il n'a plus à s'inquiéter de chasser sa nourriture, de trouver un toit, d'assurer sa survie. Ça lui a permis de dépasser sa condition animale, ses instincts (même s'il en reste des traces...) et d'accéder à un autre niveau de conscience.
La servitude à la société a en fait remplacer la servitude à la nature. Y a t'on gagné en liberté? Je pense que oui, dans la mesure où l'homme actuel peut faire le choix de retourner à l'état naturel (même s'il n'y est plus adapté du tout..) alors que l'inverse n'est pas vrai, et n'a pu se faire qu'au fil des générations...

Une autre formulation de la question consiste simplement à s'interroger sur ce que nous considérons comme notre liberté : vient elle de notre conscience (qu'on cherchera à développer) ou de nos instincts? La conscience a besoin d'ordre pour se développer, et en crée toujours un peu plus, nos instincts n'ont besoin de rien, s'expriment dans le chaos et créent un ordre naturel sans en avoir conscience... C'est sans doute cette servitude qui est dénoncée par l'auteur : la servitude à un ordre naturel dont nous sommes acteurs et inconscients.

On n'est pas obligé de remonter jusqu'au règne animal pour illustrer ceci : l'ordre et les lois dans la société humaine amène protection et justice. Et le fait d'accepter ces lois me permet en théorie de vivre en bénéficiant du fait que tous les autres acceptent aussi ces mêmes lois : ceci est créateur de liberté. Le fait d'accepter de ne pas tuer mon voisin doit aussi me protéger d'eux, je n'ai alors plus à m'en soucier, je gagne en liberté d'esprit. Rien n'est jamais gratuit : on échange simplement une liberté pour une autre, mais pas forcément sur le même niveau.

La conscience seule permet la liberté : d'agir et de penser. Face à toute servitude naturelle, il n'y a que deux solutions pour gagner en liberté. Prendre conscience des règles naturelles pour choisir ensuite de s'y conformer ou non, ou bien (et ça peut venir dans un second temps) forger un ordre que l'on choisit nous mêmes. Cette action volontaire apporte à la fois conscience et liberté : conscience de l'ordre choisi, et liberté de l'avoir choisi.

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