samedi 13 avril 2013

Confort et valeur

Le confort et la technologie nous rendent fainéants. Après tout, ceci est une évidence : c'est bien un des buts du progrès que de nous rendre la vie plus facile, d'alléger les lourdes tâches quotidiennes.
C'est bien grâce au progrès que nous pouvons avoir du temps libre, que nous ne sommes pas obligés de travailler tout le temps, que nous ne sommes plus vraiment inquiétés par le manque de nourriture.

Simplement toute médaille a son revers, et parfois on met du temps à découvrir le revers, on n'y prend pas garde et on ne voit que la bonne facette de la médaille. Quelque part, c'est en poussant les choses à leur extrême qu'on fait apparaître leur mauvais côté : avant nous ne pouvions pas réellement nous en rendre compte, car il n'existait peut être pas. Comme quoi, la réalité sait être extrémiste parfois...

Bref, le problème maintenant est que le progrès et le confort ne nous libèrent pas seulement de nos charges, ils nous libèrent aussi de tout ce qui donne de la valeur aux choses. Plus besoin de se déplacer pour aller voir  et discuter avec un ami : un sms suffit, plus besoin de se déplacer pour goûter aux milles saveurs du monde : la livraison a domicile a remplacé tout ça, plus besoin de lire un livre : le film, qu'on ne se donnera plus la peine d'aller voir au cinéma le remplace, plus besoin de chercher la moindre information, le numérique est passé par là... Le progrès facilite tout, mais malheureusement une partie de la valeur de nos actes réside dans l'effort fourni pour atteindre l'objectif. Sans effort, les choses ont moins de valeur, la vie devient davantage insipide. Qui n'a pas fait l'expérience de la perte d'intérêt face à la profusion : profusion de musiques sur un lecteur mp3, profusion de films à télécharger, de jeux piratés...

C'est très psychanalytique (et chrétien, ascendant protestant) de voir la valeur dans l'effort. Est ce un tort? Est ce juste un virage à prendre? Après tout, si pour moi une relation amicale a de la valeur, en aura t'elle plus parce que j'aurai fait l'effort de me déplacer pour voir cet ami? C'est idiot comme raisonnement.

Oui, mais j'ai deux objections.
- L'homme est idiot. Réaliser, prendre conscience des efforts fournis permet aussi de prendre conscience de la valeur qu'on accorde à nos actes. L'effort fait nous pousse à nous investir davantage, à nous impliquer davantage, par souci de rentabilité. Et c'est sans doute ceci qui peut rendre une relation plus profonde, moins superficielle. L'engagement y est différent. L'engagement se mesure bel et bien à l'effort.
- Le fait de devoir faire des efforts nous force à choisir : nous ne pouvons pas tout faire, nos efforts sont limités. Sans cette limite, plus de choix, et donc nous pouvons virtuellement tout faire, ce qui met tout au même niveau. Sans effort, nous ne faisons plus les choses par choix, mais par réflexe : il n'ya plus aucun renoncement à mettre en face.

Conclusion du soir : 
Nous avons peut être franchi un seuil. Un excès de confort nous rend la vie "trop" facile, crée une vie aseptisée qui nous ramène à la citation d'Oscar Wilde : les gens connaissent le prix de tout mais la valeur de rien. Une certaine définition du cynisme. Et malheureusement, les prix continuent de baisser. Il ne reste donc pas grand chose. Mais bon, on peut être optimisme, faire ce constat, c'est le premier pas pour redonner de la valeur aux choses, pour refuser un certain confort. Le progrès et le confort qui en découlent sont à notre disposition, à nous d'en faire bon usage, de ne pas en abuser, de refuser certaines facilités de manière à créer artificiellement un effort, et donc de la valeur. A moins de réussir à apprivoiser totalement le progrès, de réussir à bénéficier de ces avantages sans pour autant faire diminuer la valeur des choses : réussir à décorréler valeur et effort. Pas sûr d'avoir le niveau de sagesse requis personnellement, pas pour tout en tout cas...

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